jeudi 3 avril 2014

Une campagne qui pue


Le Journal de Québec et de Montréal, 3 avril 2014, p.16.

Je l’avoue, je n’en peux plus de cette campagne électorale. Elle m’aura convaincu d’une seule chose : l’haleine des politiciens pue la malhonnêteté intellectuelle.
Traditionnellement, l’art de la politique s’appuyait sur la langue de bois, l’évitement et le double langage. Les politiciens usaient du mensonge avec précaution, par crainte d’y perdre leur crédibilité et de se faire sanctionner par l’électorat
Ce qui a changé? Plus aucun mensonge n’est trop gros. Nos campagnes électorales se déroulent maintenant sur fond d’accusations fallacieuses et de raccourcis intellectuels.
Les salopards
Je pense à Philippe Couillard. Les faits parleraient d’eux-mêmes : il a fréquenté Arthur Porter, travaillé en Arabie saoudite et possédé un compte de bancaire sur l’ile de Jersey. Voter pour le PLQ équivaudrait, sous-tendent ses adversaires, à appuyer un escroc, un pro-islamiste et un partisan des paradis fiscaux. 
Je pense à Pauline Marois. Elle ne serait guère plus attirante : elle a refusé de dévoiler ses actifs familiaux, ourdi un «deal» avec un chef syndical et recruté un candidat dont la société est enregistrée au Delaware. Il y aurait nécessairement anguille sous roche, selon ses adversaires. La preuve? Elle habite dans une somptueuse résidence.
Le politicien inquisiteur ne se limite plus à scruter le passé de ses adversaires pour établir ses conclusions fallacieuses. En outre, il n’hésite pas à attaquer la crédibilité du processus électoral : des étudiants ontariens se seraient inscrits sur la liste électorale pour voler l’élection québécoise. 
Même si le directeur général des élections du Québec (DGE) a réfuté cette allégation de fraude électorale et que de toute façon il serait mathématiquement impossible qu’une poignée de votes change le résultat de l’élection le mensonge a fait œuvre utile. Déjà qu’on se serait fait voler un pays par l’argent et le vote ethnique
Le mensonge triomphe
C’est triste à dire, mais les ignominies politiciennes parviennent à se frayer un chemin dans l’électorat. Désormais, le mensonge et la suspicion triomphent de la réalité des faits. Il suffit à un politicien de répéter sans cesse le même mensonge pour que celui-ci devienne la vérité. 
Si nos politiciens se sentent libres de raconter n’importe quoi, c’est qu‘ils savent que la plupart des électeurs n’investiront ni temps ni argent pour s’informer, encore moins pour vérifier la véracité d’une affirmation grotesque. 
À défaut d’investir dans la recherche de la vérité, l’électeur n’aura d’autre choix que de s’alimenter à la malhonnêteté intellectuelle de nos politiciens; c'est-à-dire choisir ses dirigeants sur la foi de calomnies et de ragots.
Le DGE ne cesse de nous rappeler que « voter c’est le pouvoir de choisir ». Je veux bien! À condition que mon pouvoir ne se limite pas à choisir entre un menteur ou un salopard. 
Je ne sais pas pour vous, mais au moment où je remplis ma déclaration fiscale, j’ai le sentiment que je mérite mieux.