jeudi 13 décembre 2012

Guy Turcotte libéré: la crédibilité de notre système judiciaire entachée?


La Presse.ca, La Presse Débats, jeudi le 13 décembre 2012.
La remise en liberté de Guy Turcotte vous indispose-t-elle ? Craignez-vous qu’elle nuise à la crédibilité de notre système judiciaire auprès de la population ?
Expliquez-nous
L'affaire Turcotte a plongé la population dans la consternation et embarrassé la justice. Quatre ans après avoir poignardé à mort ses deux enfants, et un an et demi après avoir reçu un verdict de non-responsabilité criminelle, Guy Turcotte est maintenant en liberté. Justice a-t-elle été rendue? On dit que la justice est infaillible. Peut-être. Mais l’affaire Turcotte donne l’impression d’une grande injustice. Interviewé dans le cadre de cette affaire, le juge Wagner de la Cour suprême souligne que « si la justice est critiquée sans être expliquée correctement, sa crédibilité risque d’être minée ». Eh bien, Monsieur le Juge, elle est minée. Alors, expliquez-nous. Comment se fait-il que deux enfants soient morts et que ce soit la faute de personne? Qu’est-ce que le jury a vu qu’on n’a pas vu? Qu’est-ce que les psychiatres ont compris que le simple citoyen ne peut comprendre? Et si c’est la faute de la démence, ne devrait-on pas poursuivre le dément, accuser le dément, condamner le dément… ou au moins, s’assurer d’avoir guéri le dément? Je sais, la démence a le dos large, mais 46 coups de couteau quand même…

mardi 11 décembre 2012

Que pensez-vous des 100 premiers jours du gouvernement Marois?


La Presse.ca, La Presse Débats, mardi le 11 décembre 2012
Quelle est votre évaluation des 100 premiers jours du gouvernement Marois ? D’après vous, quel est son meilleur coup, et sa plus grande erreur ?

EN DEMI-TEINTE
Cent jours après son accession au pouvoir, c’est l’heure d’un premier bilan pour le gouvernement Marois. Au départ, l’élection du Parti québécois a suscité beaucoup d’inquiétude : certaines se sont dissipées depuis, d’autres sont persistantes. En fait, le gouvernement Marois n’est pas facile à suivre. En gérant par essais et erreurs, il a parfois donné l’impression de ne pas avoir les compétences requises pour gérer le Québec. Nous avons donc eu droit à trois mois de politique en demi-teinte. Son meilleur coup? Avoir mis en veilleuse quelques engagements électoraux, tout en ayant le courage de maintenir le retour à l'équilibre budgétaire pour 2013-2014. Sa plus grande erreur aura été de prendre des décisions précipitées dans plusieurs dossiers, donnant trop souvent l’impression de ne pas savoir où il va.  Si on peut attribuer ces erreurs de jeunesse à un gouvernement nouvellement élu, il est par contre difficile de pardonner au gouvernement Marois son copinage politique. La nomination discutable de Daniel Breton à l’Environnement et les parachutes dorés accordés à André Boisclair et Nicolas Girard risquent de faire un tort considérable à ce gouvernement qui promettait de laver plus blanc que blanc.

mardi 27 novembre 2012

Une mobilité libératrice


La Presse, mardi le 27 novembre 2012. P. A21. Aussi disponible sur cyberpresse.
Pierre Simard et Jean-Luc Migué
Après que le nouveau gouvernement du Québec a annoncé son intention d'augmenter l'impôt des nantis et la part imposable des gains en capital et des dividendes, certains Québécois ont songé à quitter le Québec. Évidemment, partir n'est pas simple. Outre la barrière linguistique et les douloureuses séparations familiales, encore faut-il trouver une terre d'accueil, une tâche ardue dans un monde où la plupart des pays multiplient les barrières à l'immigration.
Or voilà, le Québécois est aussi un Canadien. Et quelle que soit l'expression par laquelle il aime se définir - Québécois ou Canadien - il a la liberté de quitter le Québec pour une autre province canadienne sans avoir à obtenir un visa, un droit d'asile, une carte verte ou un permis de séjour. Ce droit individuel est garanti par la Charte des droits et libertés qui est enchâssée dans la Constitution canadienne.
Ce droit qui nous est accordé de quitter notre province pour aller s'installer dans une autre peut sembler anodin et sans réelle conséquence sur notre qualité de vie. Au contraire! La mobilité interprovinciale constitue l'une des grandes vertus d'un véritable fédéralisme. Ce droit permet d'instaurer une concurrence entre les gouvernements provinciaux; une saine concurrence qui s'avère bénéfique pour tous les Canadiens, y compris les Québécois.
Le Canada, rappelons-le, est une fédération de provinces qui possèdent leurs propres champs de compétences et leurs propres pouvoirs, dont celui de lever des impôts sur leur territoire. Cette décentralisation des pouvoirs confie donc à chaque province la responsabilité de déterminer un panier de services publics qu'elle financera directement auprès de ses résidants. Or, en ayant la liberté de se déplacer sur le territoire, chaque citoyen canadien a l'opportunité de choisir son lieu de résidence en comparant le panier de biens publics offert par chacune des provinces canadiennes ainsi que les prélèvements fiscaux qui y sont associés.
Il ne faut pas se surprendre qu'en annonçant son intention de hausser les impôts des particuliers, le gouvernement du Québec ait soudainement ranimé l'intérêt de certains de ses résidants pour les autres provinces canadiennes. Aucun gouvernement ne se réjouira de voir partir ses citoyens les plus mobiles: il s'agit souvent des ressources les plus qualifiées et des plus gros contribuables. Dans une province ou près de 40% des citoyens ne paient pas d'impôt sur le revenu, il y a de quoi inquiéter un ministre des Finances du Québec de voir migrer, à chaque départ annoncé, une fraction de sa cagnotte budgétaire.
En plus d'être un moyen d'échapper aux impôts abusifs des gouvernements locaux, la mobilité citoyenne offre également à chaque Canadien l'opportunité de s'exiler pour profiter de la croissance économique des provinces prospères. Bon an mal an, ce sont environ 300 000 Canadiens qui migrent à travers le Canada. C'est ainsi qu'en moins de 40 ans, les provinces de l'Alberta et de la Colombie-Britannique se sont enrichies chacune de plus d'un demi-million de nouveaux habitants en provenance des autres régions du pays. Pendant ce temps, malgré la barrière linguistique, le Québec a perdu plus de 528 000 résidents au profit des autres provinces. La population québécoise, qui représentait 27,9% de la population canadienne en 1971, avait décliné à 23,1% en 2011.
Dans cette perspective, le Québécois devrait se rappeler que, s'il suffit à un gouvernement de récolter moins du tiers des votes exprimés à une élection pour se sentir légitimé à ériger des barrières linguistiques à sa mobilité, la constitution canadienne lui permet quand même de voter avec ses jambes et de quitter la «Belle province» pour une autre province canadienne. Une liberté offrant à une majorité de Québécois la possibilité d'échapper à la dictature de sa minorité.
En conséquence, les Québécois, comme les autres Canadiens, devraient se féliciter de vivre dans un fédéralisme de concurrence et combattre vigoureusement toutes les menaces à leur mobilité citoyenne. Bref, la mobilité libératrice d'un citoyen, c'est aussi ça, le fédéralisme!

mercredi 21 novembre 2012

Le « taxicomane »


La Presse.ca, La Presse Débats, mercredi 21 novembre 2012.
Pour atteindre le déficit zéro en 2013-2014, le ministre des Finances, Nicolas Marceau, augmente les taxes sur l’alcool et le tabac et dégèle le tarif du bloc patrimonial d’électricité, sans compter la hausse d’impôt de 1,75% pour les revenus supérieurs à 100 000 $. Compte tenu de la situation économique au Québec, le budget vous apparaît-il convenable ?
Le « taxicomane »
Encore une fois, le « taxicomane » étatique a réussi à assouvir sa dépendance aux dépenses publiques. Il a même réussi à acheter les appuis lui permettant de garder les deux mains dans le Trésor public pendant quelque temps. La manœuvre? Rien d’original! D’abord, il a taxé le péché, puis le chauffage et il a grevé la carte de crédit du contribuable. Ensuite, il a gardé en fonction la distributrice à privilèges de manière à ce que les groupes d’intérêt lui fassent bonne presse. Opération réussie! Ce matin, les commentateurs de la chose publique n’en finissent plus d’exprimer leur soulagement à l’endroit du budget Marceau. Comme si le citoyen devait ignorer que le but du gouvernement était d’augmenter ses revenus en coupant le moins possible dans son train de vie. Prétextant l’équité et la justice sociale, et surtout pour satisfaire ceux qui votent du bon bord, notre ministre des Finances s’est donc affairé à prélever chez le contribuable le plus de revenus possible. Aujourd’hui, on nous demande de professer une foi aveugle dans la religion d’État et de nous féliciter d’être les contribuables les plus taxés en Amérique du Nord. Désolé, mais je ne marche pas : non aux hausses d’impôt! Comme le disait Audiard : « Le jour est proche où nous n'aurons plus que "l'impôt" sur les os. »

jeudi 15 novembre 2012

Le citoyen se meurt... vive les carrés rouges.


La Presse.ca, La Presse Débats, jeudi 15 novembre 2012.
Le ministre Pierre Duchesne songe à accorder le droit de grève aux étudiants, ce qui leur permettrait légalement d’empêcher leurs confrères d’assister à leurs cours. Êtes-vous d’accord ?
Le citoyen se meurt…
Les carrés rouges sont au pouvoir. Le temps presse, les gouvernements minoritaires sont fragiles. Vite! Changeons la loi pour accorder aux associations étudiantes le droit de grève. Légiférons pour empêcher les ignobles étudiants qui veulent étudier d’assister à leurs cours. Mais comment faire lorsque le port du carré rouge nous a enlevé toute forme de crédibilité? Faisons un grand sommet sur l’éducation! Les sommets socio-économiques ont toujours bien servi les visées collectivistes du PQ. Rien de mieux qu’une bonne discussion sous l’égide des syndicats et des associations étudiantes pour reprendre le contrôle de nos universités et annihiler les velléités individualistes des étudiants. Consolidons le monopole des groupes de pression sur le bien public. Réhabilitons la tyrannie des droits collectifs. Soyons progressistes. Ouste la Constitution, la Charte des droits et libertés et l'État qui protège vos droits individuels. Mettons fin aux injonctions de la cour et aux tristes condamnations pour outrage au tribunal de nos icônes de la pensée collectiviste. Le Québécois n’aurait jamais dû exister individuellement, c’est une dérive néolibérale. Le citoyen se meurt… vive les carrés rouges.

vendredi 9 novembre 2012

La mobilité libératrice : réflexions sur le fédéralisme canadien

Bulletin publié par L'idée fédérale , L'actualité fédérale, Novembre 2012 ,Vol.3, No.7


Pierre Simard et Jean-Luc Migué

Parfois, il fait bon de se remémorer que nous sommes privilégiés d’être membres d’une fédération qui offre la possibilité à un citoyen d’échapper aux décisions jugées inacceptables de son gouvernement provincial. Expliquons-nous!

Après que le nouveau gouvernement du Québec ait annoncé son intention d’augmenter l’impôt des nantis et la part imposable des gains en capital et des dividendes, certains Québécois ont songé à quitter le Québec.

Évidemment, partir n’est pas simple. Outre la barrière linguistique et les douloureuses séparations familiales, encore faut-il trouver une terre d’accueil, une tâche ardue dans un monde où la plupart des pays multiplient les barrières à l’immigration.

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Doit-on se réjouir de la réélection du président Obama?


La Presse.ca, La Presse Débats, vendredi 9 novembre 2012.
La réélection du président américain Barack Obama vous réjouit-elle? Que souhaitez-vous qu'il accomplisse au cours de son second mandat?
L'ILLUSION OBAMA
Le Barack Obama de la campagne présidentielle de 2008 est bien ancré dans l'imaginaire médiatique québécois. On nous le représente comme le remède à tous les maux sociaux, celui qui relancera l'économie américaine tout en luttant contre la pauvreté, les inégalités et la pollution. Malheureusement, aimer de loin signifie souvent ignorer la réalité. L'Obama de 2012 est fondamentalement un politicien comme les autres : un président qui n'a pratiquement rien réalisé de ses promesses de premier mandat et qui a basé l'essentiel de sa réélection sur la diabolisation de son adversaire républicain. Malgré les milliards de dollars investis, la campagne présidentielle américaine de 2012 n'aura finalement servi à rien. Nos voisins sont revenus à la case départ : les démocrates contrôlent la Maison-Blanche et le Sénat, alors que les républicains gardent leur main mise sur la Chambre des représentants. Aujourd'hui, les Américains héritent d'un gouvernement et d'un électorat très divisés. D'ailleurs, rien de réjouissant en perspective puisque le second mandat du président s'amorcera par des négociations pour éviter le précipice fiscal de fin d'année : coup de gueule et petite politique au menu. Ce que j'aimerais qu'il fasse dans son second mandat? Ne serait-ce que la moitié de ce qu'il avait promis de faire dans son premier mandat...

mardi 30 octobre 2012

La tentation de Salem

Le Devoir, mardi le 29 octobre 2012.

Nous avons tous déjà entendu parler des sorcières de Salem, fameux procès contre la sorcellerie et les forces du mal. J’ai l’étrange sentiment que la Commission Charbonneau suscite le même genre d’hystérie collective qui a entouré ce légendaire procès.
Reportons-nous en 1692. La petite ville de Salem, près de Boston, vit sous la peur des démons. Deux jeunes filles, en proie à des crises de convulsion, sont diagnostiquées comme ensorcelées. Lorsqu’en période de transes elles prononcent le nom de citoyens, on est convaincu d’avoir trouvé les responsables de leur envoutement. Sur la foi de ces allégations délirantes, on emprisonna plus de 200 personnes, dont une trentaine furent pendues, coupables d’avoir troublé l’esprit des jeunes filles.
La paranoïa collective s’étira ainsi sur plusieurs mois. On se mit à douter de la véracité des allégations lorsque les jeunes filles nommèrent des juges. Ces derniers étant supposément protégés par Dieu, on décida de suspendre le tribunal et de trouver des preuves avant de poursuivre les pendaisons. En l’absence de preuves, le gouverneur du Massachusetts mit un terme aux procès : il valait mieux que dix sorcières échappent à la justice plutôt qu’une personne innocente soit condamnée.
Revenons à 2012. Dans la grande ville de Montréal se tient une commission d’enquête sur l’industrie de la construction. Deux hommes atteints par les forces du mal, Zambito et Surprenant, se concurrencent dans la dénonciation de politiciens, de fonctionnaires et d’entrepreneurs. Ces derniers seraient coupables de leur avoir inoculé la cupidité responsable de leurs déplorables crimes.
Depuis, un climat de suspicion a envahi le Québec. Le public applaudit chaque nouvelle révélation et salue le courage des dénonciateurs : ils seraient enfin exorcisés de leurs démons. En se fiant aux allégations de malfrats devenus vedettes, on condamne sans réserve tous les politiciens, fonctionnaires et entrepreneurs dont le nom est prononcé par les délateurs. L’échafaud médiatique est impitoyable! Les preuves? On s’en occupera plus tard!
Oubliez aussi le gouverneur de Salem qui ramène un peu de raison dans le débat. On n’en est pas là. On en est même très loin, si on prend acte des récentes déclarations du très respecté John Gomery. Dans un élan de morale et de puritanisme, le juge à la retraite – et ex-président de la Commission d'enquête sur les commandites – déclarait avec l’aplomb du justicier de Salem qu’il était choqué, voire horrifié par ce qu’il avait entendu. Prêtant foi aux témoignages, rumeurs et soupçons, il attribuait le mauvais état de nos routes aux entrepreneurs malhonnêtes, accusait d’incompétence le maire de Montréal et décrétait qu’on avait maintenant la preuve que le Québec était la province la plus corrompue. La cause serait entendue…
Le Québec de 2012, comme les habitants de Salem, mène une lutte contre les forces du mal. Toutefois, on semble déjà avoir oublié la mise en garde de la juge Charbonneau : elle ne préside pas un tribunal et qu’elle ne rendra pas de verdict de culpabilité. Pour l’instant, la commission donne écho aux épanchements d’escrocs pour qui la délation est une planche de salut potentiel. Un jour, il faudra toutefois faire la preuve de ces allégations; ce sera le rôle des tribunaux.
Comme tous les Québécois, j’ai hâte que justice soit faite. J’aimerais que cesse la corruption qui plombe nos finances publiques et que le Québec se délivre des forces du mal. Mais cette paranoïa collective me fait peur. Le Québec de 2012, ce n'est pas la France de Robespierre ou la Russie de Staline, lieux où des condamnations arbitraires tombaient sous la foi de simples allégations. Le Québec est encore un État de droit où un suspect est présumé innocent tant qu'il n'a pas été déclaré coupable par un tribunal. C’est ce qu’on appelle la présomption d’innocence.
Dans l’affaire de Salem, une des jeunes filles déclara quelques années plus tard : «Nous avons fait ça pour nous divertir et nous nous sommes bien amusées!» Malheureusement, beaucoup d'innocents avaient été tués.

jeudi 25 octobre 2012

Faut-il renforcer la loi 101?


La Presse.ca, La Presse Débats, jeudi 25 octobre 2012.
Depuis 10 ans, la proportion de Québécois qui parlent français a glissé de 83% à 81%. Par contre, durant la même période, le pourcentage d’immigrants qui utilisent le français à la maison a grimpé de 5,2 à 8,7%. À la lumière de ces statistiques, y a-t-il lieu de renforcer la loi 101, comme le croit le gouvernement Marois ?

Un problème inexistant
Le français décline-t-il au Québec? Pour certains analystes, le français fait des progrès; pour d’autres, il agonise. L’interprétation dépend du politicien, du média ou du journaliste qui analyse les données linguistiques du dernier recensement de Statistique Canada. En vérité, il est difficile de dire si le français se porte mieux ou s’il est pire qu’il y a dix ans. Or, c’est bien là le malheur de notre gouvernement provincial : s’il n’y a pas de problème avec la langue française, comment expliquer qu’on s’occupe à résoudre un problème inexistant? Que faire avec les multiples solutions proposées pour résoudre ce soi-disant problème national? Comment justifier un renforcement de la loi 101 ou l’obligation du Cégep en français lorsque la catastrophe annoncée tarde à se manifester? Eh bien, si ça prend un problème, créons un problème! Comme ça, en offrant des solutions à un problème qui n’existe pas, on réussira à créer de nouveaux problèmes qui appelleront de nouvelles solutions. Des solutions qui ne manqueront pas de conduire à des problèmes encore plus grands qui, chaque fois, devront être résolus par de nouveaux impôts ou des contraintes aux libertés individuelles. Bref, les problèmes, nos politiciens s’en occupent…

La nébuleuse affaire Lance Armstrong

Journal de Montréal et Journal de Québec (p.19) jeudi 25 octobre 2012.

Filip Palda et Pierre Simard

L’Agence américaine antidopage (USADA) déposait récemment un rapport reprochant à Lance Armstrong l’usage de produits dopants durant sa carrière cycliste. C’est grâce à la dénonciation d’anciens coéquipiers qu’on aurait finalement réussi à clouer le cercueil du septuple vainqueur du Tour de France. Depuis, Lance Armstrong est honni à la face du monde. Est-il vraiment coupable de dopage? Nous demeurons sceptiques face à ce rapport qui aura, malgré tout, réussi à saper la réputation de l’ex-champion cycliste.

Si les éléments de preuve avancée par l’USADA semblent inébranlables, c’est seulement qu’on accorde une importance démesurée aux ouï-dire et qu’on néglige d’autant les preuves directes et scientifiques. Des preuves qui, malgré les nombreuses allégations, ont été impossibles à établir à ce jour. Aujourd’hui, force est de constater que si cette nouvelle controverse est accablante pour Lance Armstrong, elle l’est tout autant pour la bureaucratie de l’antidopage.

Oublions les « on-dit », les potins ainsi que les rumeurs et prêtons-nous à un court exercice. Supposons, comme l’affirme certains de ses coéquipiers, que Lance Armstrong a utilisé des drogues améliorant sa performance pendant toute sa carrière post cancer. Faisons l’hypothèse, comme le veut la rumeur, qu’il était le roi de la triche et qu’il pouvait contourner les tests antidopage dans 99 % des cas (le crime n’est jamais parfait, même lorsqu’on parle d’Armstrong). Enfin, tenons pour acquis que Lance Armstrong dit vrai lorsqu’il affirme avoir été testé 500 fois dans sa carrière.

Les outils de l’analyse statistique nous permettent de calculer que les probabilités qu’Armstrong échappe à un contrôle positif dans ces circonstances sont de sept dixièmes d’un pour cent (0,07 %). En somme, la probabilité que le cycliste ait pu échapper aux tests de l’agence — malgré son génie de la triche — est donc infime. Statistiquement, les probabilités d’être contrôlé positif en au moins une occasion était de 99,3 %, et ce, malgré sa faculté à pouvoir contourner les tests antidopages 99 fois sur 100.

Comment l’USADA peut-elle nous expliquer cette capacité quasi-miraculeuse de Lance Armstrong à contourner les tests antidopages? C’est un défi à la statistique, voire à la raison. À moins, évidemment, que Lance Armstrong ne se soit pas dopé…

La conspiration du silence.
La seconde thèse de l’Agence repose sur l’idée que Lance Armstrong a orchestré une vaste conspiration du silence autour de ses séances de « piquerie ». C’est ainsi qu’à chaque Tour de France auquel il a participé, ses sept coéquipiers auraient comploté avec lui pour déjouer les investigations incessantes des agences antidopages. Voilà qui nous laisse également songeurs.

L’analyse économique de la conspiration nous enseigne que l'incitation à participer à un complot est concevable lorsque les gains de la tricherie sont supérieurs à ceux qu’on pourrait tirer d’une dénonciation. Pourquoi les coéquipiers d’Armstrong auraient-ils accepté de participer à ce complot alors que sa dénonciation aurait pu leur procurer une rente considérable? Le dénoncer n’était-elle pas l’occasion inespérée pour eux de devenir des héros, d’obtenir un contrat pour un livre ou même un moyen de dédouaner leur propre tricherie? Les gains potentiels d’une dénonciation étaient beaucoup plus importants que la compensation qu’Armstrong aurait pu leur verser pour acheter leur silence.

En réalité, le fait qu'aucun d’eux n’ait porté des accusations contre lui suggère que les gains anticipés d’une telle dénonciation étaient insuffisants à l’époque. À moins, évidemment, que Lance Armstrong ne se soit pas dopé…

Aujourd’hui, les gains d’une dénonciation de Lance Armstrong semblent s’être accrus considérablement. Ils sont nombreux à s’abreuver à la rente de déchéance de l’ancien « boss », en particulier le principal acheteur de ces délations, qui cherche depuis des lunes à prouver son efficacité en détrônant l’icône du cyclisme.

Bref, même si vous n'êtes pas un admirateur de Lance Armstrong ou que vous n’avez aucun intérêt pour l’analyse économique des conspirations, l’affaire Armstrong n’offre que deux interprétations possibles : soit cette vaste bureaucratie de l’antidopage (qui coute des millions de dollars) est gravement incompétente et leurs tests sont aussi inefficaces qu’inutiles, soit Lance Armstrong est tout simplement innocent. L’un n’exclut pas l’autre, évidemment!

jeudi 11 octobre 2012

Taxe santé et hausse d'impôts: un bon compromis?

La Presse.ca, La Presse Débats, jeudi le 11 octobre 2011
Que pensez-vous de la décision du gouvernement Marois de maintenir la taxe santé, en la rendant plus progressive, et d’augmenter les impôts des Québécois dont le revenu net est supérieur à 100 000 $ ? Est-ce un bon compromis ? Une promesse reniée ?

Promettre n'importe quoi
Ah les promesses électorales! S’il fallait que nos politiciens tiennent leurs promesses, le Québec serait en banqueroute depuis longtemps. Le PQ avait promis d’abolir la taxe santé et de faire payer les riches. Le problème, c’est que notre nouveau ministre des finances a rapidement réalisé que le Québec manquait de riches et qu’il les ferait fuir en les surtaxant. Que faire? Faire comme tout politicien qui se respecte et… ne pas respecter sa promesse. De toute façon, qui lui en voudra? Les promesses électorales, c’est comme les résolutions du jour de l’an : il ne suffit que de quelques semaines pour qu’elles soient oubliées. Les électeurs ne pénalisent jamais les politiciens qui rompent leurs promesses. C’est d’ailleurs pourquoi ils promettent n'importe quoi sans en mesurer les effets. Pis encore, les tergiversations des dernières semaines auront paradoxalement montré qu’on fait des promesses pour gagner des élections et qu’on les rompt pour se maintenir au pouvoir. Un politicien qui revient sur ses promesses n’est peut-être pas édifiant, mais je n’ose imaginer les dommages créés par celui qui les réaliserait. Vous voulez ne pas être déçu par la politique? À la prochaine élection, votez pour celui qui ne fait pas de promesses.

mardi 9 octobre 2012

Les dangers d’une gouvernance verte


Journal de Québec et Journal de Montréal, mardi le 9 octobre 2012.

Pierre Simard et Germain Belzile*

Le Québec deviendra un chef de file environnemental dans le monde, selon Mme Marois. « Les verts sont au pouvoir », ajoute notre nouveau ministre de l’Environnement. Cette nouvelle gouvernance verte ramènera-t-elle la province sur le chemin de la prospérité? Permettez-nous d’en douter.
Le gouvernement ne crée pas d’emploi
Il suffirait, semble-t-il, d’un peu de volonté gouvernementale pour inonder le marché d’emplois verts. La réalité, c’est que le gouvernement ne crée pas d’emploi. S’il choisit d’investir dans un secteur économique, ce sera au détriment d’un autre. En d’autres mots, tout ce qu’un gouvernement péquiste pourra faire, c’est de subventionner son économie verte par des impôts prélevés dans l’économie productive.

Le gouvernement ôtera donc des ressources à des entreprises qui contribuent à notre qualité de vie, pour les réorienter vers des entreprises vertes dont les activités seront triées par les politiciens. Par exemple, il détruira des emplois dans le secteur de l'énergie conventionnelle en nous promettant, en contrepartie, de créer des emplois dans les énergies vertes.
Le problème avec les emplois verts promis par le gouvernement Marois, c’est qu’on détruira des emplois visant à satisfaire les préférences des consommateurs, pour les remplacer par des emplois correspondant aux préférences des politiciens. Et c’est sans compter que l’implication du gouvernement dans l’économie ne se fait jamais à coût nul. N’oubliez pas qu’à l’occasion de ce transfert de richesse vers l’économie verte, le gouvernement prélèvera un petit pactole pour subvenir à ses propres opérations, achètera au passage l’adhésion des groupes de pression et paiera une prime pour couvrir les risques financiers d’un entrepreneur politique qui n’entreprend jamais rien sans que l’État ne couvre ses arrières.
Les politiciens attirent les prédateurs de fonds publics
En confiant à des politiciens le rôle de sélectionner les entreprises de l’avenir, on étouffe l’entrepreneur capitaliste au profit de l’entrepreneur politique. On privilégie cet entrepreneur qui gagne sa place au soleil en décrochant un mirobolant contrat gouvernemental, en faisant subventionner son entreprise ou en faisant adopter une loi ou un règlement qui nuit à la concurrence. La commission Charbonneau nous rappelle d’ailleurs, chaque jour, les dangers de l’intervention massive de l’État dans l’économie.

Ce n’est pas parce qu’un élu a le pouvoir d’investir l’argent des contribuables qu’il est apte à faire les bons choix pour l’avenir du Québec. L’exemple des pays européens qui ont dû abandonner d’ambitieux programmes publics verts  -  en raison des coûts astronomiques et de leurs effets néfastes sur les finances publiques - devrait nous inviter à la prudence.
Le gouvernement a peut-être un rôle légitime à jouer dans le financement de la recherche en environnement, mais les politiciens devraient faire acte d’humilité et laisser les entrepreneurs capitalistes s’occuper des préférences environnementales des citoyens. N’ayez crainte, il y aura toujours un entrepreneur capitaliste pour satisfaire une préférence verte chez le consommateur.
D’ici là, on peut présumer que l’opération « économie verte » mise de l’avant par le nouveau gouvernement réduira notre qualité de vie, nous fera perdre des emplois productifs et renforcera la présence d’un type d’entrepreneur dont nous cherchons à nous débarrasser : le prédateur de fonds publics.
* Les auteurs sont respectivement professeur à l’ENAP et maître d’enseignement à HEC Montréal.

lundi 1 octobre 2012

Omar Khadr devrait-il être libéré rapidement?


La Presse.ca, La Presse Débats, 1er octobre 2012.
Maintenant qu’Omar Khadr a été rapatrié au Canada, quand devrait-on le libérer ? Le plus tôt possible ? L’an prochain, lorsqu’il sera admissible à une libération conditionnelle ? Ou seulement en 2018, quand il aura purgé toute sa peine ?

Les opinions sur le sort qu’on devrait réserver à Omar Khadr sont très polarisées. À un extrême, il y a ceux qui clament haut et fort que Khadr n’était qu’un enfant-soldat qui doit être remis immédiatement en liberté : une victime inoffensive et injustement traitée par les méchants Américains. À l’autre extrême, il y a ceux qui voient Khadr comme un terroriste incorrigible qui devrait purger l’entièreté de sa peine afin d’éviter qu’il reprenne ses activités subversives dès sa remise en liberté. Entre le meurtrier sanguinaire et la pauvre victime de son éducation familiale, il y a peut-être un autre Khadr : un Khadr inconnu de nos politiciens, un Khadr différent de celui qui ne sert qu’à engranger des votes. Il serait peut-être opportun de  dépolitiser le dossier et de laisser les autorités compétentes et apolitiques déterminer le sort à lui réserver. Ce qu’il nous faut, c’est un comité qui, tout en se rappelant que Khadr n’avait que 15 ans lors des événements qu’on lui reproche, considérera aussi le fait qu’il a plaidé coupable à des crimes de guerre. Entre l’irresponsabilité totale et l’entière responsabilité de ses actes, il y a peut-être une position plus nuancée que celle avancée par nos politiciens et nos groupes d’intérêts.

mercredi 26 septembre 2012

Le PLC a-t-il besoin d'un Justin Trudeau ou d'un Mark Carney?

La Presse.ca, La Presse Débats, mercredi le 26 septembre 2012.
De quel style de chef a besoin le Parti libéral du Canada? D’un Justin Trudeau, qui veut suivre les traces de son père? Ou bien d’un Mark Carney, le gouverneur de la Banque du Canada, qui fait l’objet de pressions par des militants pour se présenter ?
Le plus beau !
Qui choisir entre Mike Carney et Justin Trudeau? Le plus beau des deux! Daniel Hamermesh, de l’Université du Texas, est le père de la « pulchrinomics » : un nouveau champ de la science économique qui mesure les avantages de la beauté physique sur plusieurs aspects de votre vie. Selon ses recherches, la beauté serait payante. Les belles personnes auraient de meilleurs revenus que les laides. Il en irait de même pour les politiciens, dont l’apparence physique serait un gage de succès électoral. Pour me mettre au parfum de la course à la chefferie du Parti libéral du Canada, j’ai suis donc allé voir la photo des deux candidats. Rien de concluant à mes yeux, sinon que Justin aurait l’atout supplémentaire d’être un bon boxeur. C’est sans doute ce qui explique qu’avant même d’avoir déposé officiellement sa candidature et présenté sa plateforme électorale, le fils de l’autre mènerait dans les sondages d’opinion. D’ici à ce que les faiseurs d’image nous étalent les qualités intellectuelles des candidats en lice, je m’abstiendrai de prendre position. Mon problème, je l’avoue, c’est que ma grand-mère me répétait sans cesse que la beauté n’apporte pas à manger… elle ignorait sans doute que la beauté peut faire gagner des élections. Le pire : je blague à peine!

lundi 24 septembre 2012

Devrait-on hausser les impôts des revenus supérieurs à 130 000$?

La Presse.ca, La Presse Débats, lundi 24 septembre 2011.

Êtes-vous d’accord avec le gouvernement Marois qui entend augmenter les impôts des revenus supérieurs à 130 000 $ en ajoutant deux paliers d’imposition supplémentaires ? Est-il justifié de procéder de façon rétroactive ?
Une amende à la richesse
Personne n’aime payer des impôts, le riche comme le moins riche. Surtout si ce nouvel impôt prend l’allure d’une punition à une règle non écrite. En annonçant deux nouveaux paliers d’imposition (+ de 130 000 $ et + de 250 000 $), le gouvernement Marois cherche sans doute à satisfaire les revendications d’une gauche politique pour qui les mieux nantis ne sont que des exploiteurs. En imposant les hauts salariés de manière rétrospective, il envoie cependant un mauvais message : celui que le gouvernement peut venir fouiller dans vos poches sans vous en informer préalablement. C’est comme si on vous envoyait une facture pour avoir dépassé les limites de la richesse acceptable au Québec. Voici votre amende, ça vous apprendra! Le problème, c’est que les riches vont apprendre. Ce n’est pas parce qu’un riche est riche qu’il est con. L’an prochain, il travaillera moins, votera par les pieds en s’expatriant ou se trouvera une niche fiscale quelque part. La mine des hauts salariés qui paient des impôts pour ceux qui n’en paient pas est sur le point de se tarir. À court terme, le PQ aura peut-être regagné quelques votes chez Québec solidaire, mais ce n’est sûrement pas de cette façon qu’on relancera la croissance économique du Québec.

jeudi 20 septembre 2012

Que pensez-vous du cabinet Marois ?

La Presse, Débats, vendredi 21 septembre 2012, p.A21.
La Presse.ca, La Presse Débats, jeudi le 20 septembre 2012.

Que pensez-vous de la composition du cabinet Marois ? Certaines nominations vous surprennent-elles ?

La diversion 
Le conseil des ministres présentés par Mme Marois a un mandat clair : préparer les prochaines élections. Des élections qui, selon les observateurs, pourraient être déclenchées d’ici deux ans. L’objectif de Mme Marois est simple : profiter des prochains mois pour récupérer les appuis perdus au profit de Québec solidaire et Option nationale. Des appuis qui, si l’on se fie aux stratèges péquistes, auraient coûté au PQ sa majorité parlementaire. Pour y arriver, Mme Marois a opté pour une stratégie de diversion. Pendant que les ministères à vocation économique seront sous la responsabilité de recrues inexpérimentées et surchargées, les étoiles du parti s’occuperont de récupérer les votes perdus. Pendant que les Marceau et Gaudreault se tiendront loin des feux de la rampe – car trop occupés à mettre en place de nouvelles structures, à déménager des fonctionnaires et à commander la nouvelle papeterie de leur ministère – une nouvelle campagne électorale battra son plein. Les plus médiatisés des ministres comme Drainville, Lisée, Duchesne et Breton seront en mission pour récupérer le vote souverainiste, le vote étudiant, le vote syndical et le vote vert. Bref, le vote qui aurait pu faire la différence entre un gouvernement minoritaire et majoritaire. Pendant ce temps, le Plan Nord se transformera en Plan mort et on aura réussi à détourner l’attention des électeurs de la précarité de nos finances publiques.

mardi 18 septembre 2012

Le mouvement de colère des musulmans est-il inquiétant?

La Presse.ca, La Presse Débats, mardi 18 septembre 2012.

Êtes-vous inquiet du mouvement de colère qui prend de l’ampleur dans les pays musulmans, en réaction à la diffusion de la vidéo anti-islam réalisée aux États-Unis ? Craignez-vous que cette haine anti-américaine puisse dégénérer ?
Un fanatique en attire un autre
Sept ans après le scandale des caricatures de Mahomet, le monde arabe s’embrase à nouveau. Cette fois, c’est la bande-annonce d’un navet cinématographique qui justifie la  violence et attise la haine antiaméricaine. Ce film qui, pour un Occidental, n’est rien d’autre qu’une parodie religieuse de mauvais goût, est interprété comme une provocation inacceptable par certains Musulmans. Allez savoir! Il se trouvera toujours quelqu'un, quelque part, pour réagir aux caricatures et aux parodies, à fortiori si c’est pour haïr les Américains. Malgré les idées véhiculées lors du printemps arabe, ces manifestants islamistes ignorent totalement les principes de la démocratie et de la liberté d’expression. Ils ne comprennent pas qu’un illustre inconnu de la Californie puisse produire un film sans que le gouvernement américain et les diplomates de son consulat de Benghazi (Libye) en soient responsables. Le danger, c’est que ce fanatisme religieux suscite l’émergence d’une réplique tout aussi violente. Si Georges Darien a raison,  « seul le fanatisme de la liberté peut avoir raison du fanatisme de la servitude et de la superstition. »

jeudi 13 septembre 2012

Qui choisir à la tête du PLQ?

La Presse.ca, La Presse Débats, 13 septembre 2012.

Dans le contexte actuel, qui ferait le meilleur chef pour succéder à Jean Charest à la tête du Parti libéral du Québec?

La qualité de l'image
Le Parti libéral du Québec n'est plus, depuis longtemps, un parti d'idées. Aujourd'hui, le PLQ est d'abord et avant tout un parti de pouvoir. Dans cette perspective, les apparatchiks libéraux vont probablement chercher à identifier le candidat (ou la candidate) pouvant les reporter au pouvoir le plus rapidement possible. Il ne faut pas oublier que cette course à la direction se tiendra en parallèle de la commission Charbonneau. Cet événement hautement médiatisé pourrait déterrer des cadavres du placard libéral et, ce faisant, perpétuer l'odeur de corruption lui ayant coûté la victoire aux dernières élections. Dans ce contexte, il ne faut donc pas exclure qu'un candidat externe, montrant patte blanche, vienne brouiller les cartes. Depuis quelques jours, on parle beaucoup de Philippe Couillard. Toutefois, son nébuleux départ pour le secteur privé pourrait éventuellement lui nuire.

mardi 11 septembre 2012

Rapides, efficaces et abordables


La Presse, Mardi 11 septembre 2012, p. A 28. (Disponible sur La Presse.ca)

Allez savoir! Il existerait des sites de rencontres nouveau genre : celui des papas gâteaux. Des Québécoises en quête d'argent ou de cadeaux utiliseraient la toile pour se dénicher un riche protecteur. Et puis?

Qu’est ce qu’il y a de nouveau à ce que Kelly, 20 ans de Montréal, soit à la recherche d’un homme âgé de 18 à 90 ans pour la soutenir financièrement? Que Dan, 53 ans de Montréal, dont le salaire annuel oscille entre 125 000 et 150 000 $, soit intéressé à gâter une femme avec des repas, des rendez-vous galants, du magasinage et des voyages? Rien de nouveau! Ce marché a toujours existé et ce n’est pas internet qui l’a créé.

La toile ne fait que faciliter les transactions entre des jeunes femmes et des hommes plus âgés; des individus comme vous et moi qui cherchent à satisfaire leurs attentes et leurs préférences en matière de relation de couple.

Si la croissance fulgurante des sites du genre Facebook est souvent associée au désir d’échanger entre amis, il ne faut pas sous-estimer l’intérêt des sites permettant de communiquer entre inconnus. Outre des considérations de fausse pudeur, ces sites de rencontres ne sont pas différents des sites de recherche d’emploi qui foisonnent sur la toile.

N’en déplaise aux puritains, ces sites sont des outils de recherche efficace pour mettre en relation hommes et femmes en quête d’un(e) partenaire de vie, ou pour jumeler travailleurs et entreprises sur le marché de l’emploi.

Comme l’expliquaient sur leur blogue les réputés économistes Gary Becker et Richard Posner, trouver l’âme sœur, ou encore trouver un travail ou un employé à la hauteur de ses attentes, peut s’avérer une tâche difficile. Puisque l’enjeu d’un mauvais maillage est grand et que les coûts de mettre fin à une relation d’amour ou d’emploi sont élevés, on sera enclin à investir beaucoup de temps et d’énergie à réduire l’incertitude entourant nos relations amoureuses ou d’affaires.

L’appariement d’un couple, comme celui d’un employé et d’un employeur, se fait généralement en deux étapes. Une première étape consiste à repérer les candidats potentiels et une seconde à sélectionner le bon candidat. C’est sur le plan du repérage des candidats potentiels que les sites de rencontres et de recherche d’emploi sont particulièrement utiles.

Puisque l’univers des partenaires de vie, des travailleurs et des emplois potentiels est immense, il est parfois difficile de filtrer les candidats intéressants. Pour ce faire, l’utilisation des sites spécialisés est un moyen rapide, précis et peu coûteux de réduire la liste des candidats prometteurs. Ce qui permet évidemment de consacrer davantage de temps et d’énergie à l’étape de la sélection du partenaire.

On peut donc présumer que les unions nées en ligne auront tendance à être plus stables que celles concoctées à la Cage aux sports de votre patelin. Essentiellement, les sites de rencontres permettent aux âmes en détresse d’élargir leurs champs d’investigation et de raffiner le repérage de l’âme sœur, réduisant d’autant ce que mon ami statisticien appelle les « erreurs de sélection ».

Il en va de même pour les sites de recrutement de main-d’œuvre. Rapides et efficaces, ces services permettent aux employeurs d’éviter de coûteuses campagnes d’embauche, tout en facilitant le repérage d’un travailleur ayant le profil souhaité.

En diminuant les coûts de recherche d’un partenaire éventuel, les services de maillage en ligne permettent de réduire l’incertitude dans nos interactions sociales. Qu’on le veuille ou non, ils auront dans le futur un impact considérable sur nos choix personnels et professionnels, et ce, pour notre propre bonheur! Il est donc temps de cesser de présenter internet comme une calamité au service des agresseurs.

jeudi 6 septembre 2012

Quel est l'héritage de Jean Charest?


La Presse.ca, La Presse Débats, jeudi le 6 septembre 2012.

Quel legs laisse Jean Charest comme premier ministre du Québec ? Quelles ont été ses plus grandes réalisations durant ses neuf années au pouvoir?

Un artiste de la politique.
Jean Charest est un artiste. Parmi les plus doués de sa génération. Il a maitrisé l’art de la politique mieux que quiconque. Pendant 28 ans, il a appliqué à la lettre la recette édictée au XVIIIe siècle par Jonathan Swift : faire croire aux citoyens des faussetés politiquement correctes, ne pas leur en faire avaler trop à la fois, soustraire ces mensonges à toute vérification possible et éviter d’outrepasser les bornes du vraisemblable. Il est ainsi devenu à la fois une figure politique des plus admirées et des plus détestées. Un brillant politicien qui aura malheureusement contribué à renforcer le désaveu et le cynisme des citoyens envers la classe politique. Sa plus grande réalisation? Avoir réussi à mettre en veilleuse les velléités souverainistes du Québec. Celui qu’on surnommait à une époque Monsieur Canada aura aussi été un excellent ambassadeur du Québec sur la scène internationale. Sur le plan économique, la réingénierie de l’État promise n’aura finalement été que ça : une promesse électorale. Sous sa gouverne le Québec aura peut-être été épargné des soubresauts de la dernière crise, mais il laisse la province dans une situation financière précaire. Cela dit, M. Charest est encore jeune et… les grands artistes ne meurent jamais.

mercredi 5 septembre 2012

Quelle marge de manoeuvre aura Mme Marois?


La Presse.ca, La Presse Débats, mercredi le 5 septembre 2012.

Comment interprétez-vous les résultats des élections de lundi? Quelle marge de manœuvre aura la première ministre Marois pour gouverner?
L’avantage de la glace.
Mme Marois a gagné ses élections, mais elle a concédé l’avantage de la glace à ses adversaires. Hier soir, outre le triste événement du Métropolis, nos grands leaders politiques rayonnaient et n’avaient que de bons mots pour leurs adversaires. Ils avaient tous une bonne raison de se réjouir : le PQ se targuait d’avoir repris le pouvoir, le PLQ d’avoir admirablement survécu au tsunami prédit par les sondeurs d’opinion et la CAQ, d’avoir récolté 27% des suffrages de l’électorat. Cette belle harmonie entre chefs ne devrait durer que le temps de se refaire une santé financière. Une fois ce temps d’arrêt écoulé, la joute politique reprendra et la marge de manœuvre de Mme Marois sera alors très mince. Simplement parce que lors du prochain match, ce n’est pas Mme Marois qui contrôlera l’agenda électoral. L’opposition pourra la faire tomber à tout moment par un simple vote de censure. On a beau s’imaginer qu’il lui suffira de faire des compromis pour se maintenir au pouvoir, il n’en est rien.  La réalité, c’est qu’un gouvernement minoritaire dure aussi longtemps que les partis d'opposition le décident : le temps que se présente à eux une fenêtre d’opportunité favorable à une reprise du pouvoir. En politique, tout n’est qu’une question d’opportunité.

jeudi 30 août 2012

Rien d’important ne se passera le mardi 4 septembre 2012!

La Presse.ca, La Presse Débats, jeudi le 30 août 2012.

Rien d'important!
La présente campagne électorale est encore une fois haute en couleur. Chacun des chefs de parti promet mer et monde aux électeurs; chacun d’eux s’engage à mener les Québécois vers le bonheur éternel par des décisions toujours plus efficaces. C’est ainsi que pour plusieurs électeurs, l’accession de Pauline Marois comme première femme au poste de premier ministre est annonciateur d’un changement profond de la politique québécoise. Tout ça n’est qu’illusion! Homme ou femme, peu importe le chef élu, il y a peu de chance qu’il réalise ses promesses électorales. Comme l’expliquait le sociologue français Jacques Ellul, le pouvoir politique est la plupart du temps impuissant. Les politiciens ont beau être sincères et déterminés, ils ne maîtrisent guère la machine de l’État ni les impératifs économiques qui conditionnent leur prise de décision. Après les réjouissances des vainqueurs, où l’on portera aux nues les vertus de l’exercice démocratique, il faut s’attendre à la traditionnelle déclaration venant briser tous les espoirs : « Nous n’étions pas au courant du piètre état de nos finances publiques ». Je ne voudrais pas faire mon rabat-joie, mais, pour reprendre la formule d’Ellul, rien d’important ne se passera le mardi 4 septembre 2012!

jeudi 23 août 2012

Quel chef s'est démarqué dans les débats?


La Presse.ca, La Presse Débats, mercredi 22 août 2012
D’après vous, les quatre débats des chefs auront-ils un impact sur le résultat des élections le 4 septembre ? Quel chef s’est le plus démarqué ? Lequel a le plus perdu de plumes ?
Une foire d’empoigne
Ces débats me font penser aux sports de combat arrangés. À l’instar de la lutte professionnelle, les belligérants rivalisent de trucs spectaculaires et d’arguments futiles pour terrasser ou déstabiliser leur adversaire. Une fois le combat terminé, comme à la boxe, on est toujours surpris du verdict des juges. Tout comme on est surpris de l’appréciation de ces analystes politiques, soi-disant neutres, qui réussissent à décréter un vainqueur en décelant des points marquants qui ont échappé au commun des téléspectateurs. Parmi les plus perspicaces, on retiendra celui qui a déclaré vainqueur le chef absent du débat : Legault aurait gagné le débat Charest/Marois. N’importe quoi! Qu’a-t-on appris de ces quatre soirées de débat? Que nos politiciens ont la solution à tous nos problèmes en débat préélectoral, mais se voient affligés d’amnésie ou d’incapacité chronique une fois au pouvoir. Les débats sont censés vous faire changer d’opinion ou permettre aux indécis de s’en forger une. En réalité, ces débats n’auront guère d’impact sur le résultat des élections. Chacun aura vraisemblablement conforté sa clientèle respective sans réussir à raccrocher l’électeur désabusé des promesses électoralistes. Une foire d’empoigne qui aura bien servi nos grands réseaux de télévision et, parce que je suis un analyste perspicace, Costco!

vendredi 17 août 2012

Voter n'est pas un devoir!


La Presse, Débats, vendredi le 17 août 2012, p.A15  (Disponible sur La Presse.ca)
Alors que le « promessomètre » électoral québécois atteint des niveaux ridicules, les chantres de la démocratie investissent les médias pour nous rappeler qu’il est de notre devoir d’aller voter. Devrait-on les écouter? À vous de décider!
Vous avez le sentiment que les politiciens vous racontent n’importe quoi. Aucun parti politique ne répond à vos aspirations. À vos yeux, qu’un parti prenne le pouvoir plutôt qu’un autre ne change rien. Dans ce cas, il n’y a pas de mal à rester chez vous et à vous abstenir. (Ô sacrilège!)
Pourquoi donneriez-vous votre consentement à des propositions électoralistes du simple fait qu’on clame, haut et fort, que vous devez remplir votre devoir de citoyen? Voter n’est pas un devoir, c’est un droit!
Achèteriez-vous une maison qui vous rebute? L’achèteriez-vous sans la visiter ou sans vous informer des frais qui s’y rattachent? Sûrement pas! Pourquoi donneriez-vous votre aval à ce que des élus s’accaparent une part appréciable de vos revenus en échange de l’adoption de centaines de lois et de règlements dont vous ignorez la teneur et les conséquences; en échange de services publics dont vous jugez ne pas avoir besoin?
Soyons honnêtes, comme l’expliquent les économistes des choix publics, beaucoup d’électeurs font désormais la sourde oreille aux politiciens. Ce sont pour la plupart des citoyens avisés (des ignorants rationnels) qui ont décidé de ne plus investir de temps et d’argent à connaître les tenants et aboutissants des promesses des partis politiques. Estimant que leur vote a peu de chance d’influer sur le résultat des élections, ils ne voient pas d’intérêt à analyser de vagues et pompeuses promesses électorales dont les conséquences sont, avouons-le, pratiquement inextricables.
Malgré tout, on ne cesse de les harceler pour qu’ils aillent voter. Comme s’il suffisait de développer un slogan accusateur ou un message télévisé culpabilisateur pour ramener les électeurs dissidents dans l’isoloir.
Évidemment, l’insistance de la classe politique à amener le plus grand nombre de citoyens aux urnes n’est pas désintéressée. D’abord parce que chaque parti politique reçoit du Directeur général des élections une allocation annuelle basée sur les votes recueillis lors des dernières élections (0,85 $ par électeur en 2012). Ensuite, et surtout, parce que nos politiciens ont besoin du consentement du plus grand nombre pour se légitimer.
Même si l’absentéisme électoral n’empêche pas la prise du pouvoir, le silence d’une partie significative de l’électorat est un acte politique non négligeable. Le refus de l’électeur de cautionner les diverses propositions politiques qui lui sont offertes remet en question la légitimité des élus dans l’exercice de ce pouvoir. Par exemple, lorsque le citoyen refuse de voter à l’aveuglette, il devient plus difficile de justifier des politiques à caractère électoraliste ou partisan en affirmant qu’un fort pourcentage de l’électorat appuie la démarche.
Rassurez-vous, s’abstenir de voter n’est pas inutile. C’est aussi envoyer un message aux politiciens : celui qu’ils ont été incapables de répondre à vos aspirations. Au risque de déplaire aux hérauts de la participation électorale, lorsque les politiciens ne sont plus capables de donner aux électeurs une bonne raison d’aller voter, l’absentéisme a le mérite de servir de coup de semonce à une élite politique déconnectée de ceux qu’elle aspire à représenter. C’est aussi ça, la démocratie!

jeudi 21 juin 2012

Une Fête nationale différente cette année ?


La Presse.ca, La Presse Débats, jeudi le 21 juin 2012.
La Fête nationale aura-t-elle une coloration particulière cette année en raison du conflit étudiant ?
Subventionner le saccage 
Il fut une époque où j’avais hâte à la Saint-Jean. Cette année, j’ai hâte au lendemain. La Fête nationale est devenue un événement hautement politisé. Elle s’est transformée, au fil des ans, en événement de propagande pour les souverainistes du Québec. S’inviteront également à la fête cette année : les carrés rouges, les « Occupons … » et sans doute quelques casseurs professionnels. On a même prévu une période d’échauffement par une grande manifestation la veille. Plus que jamais, la table est mise pour un affrontement avec les forces de l’ordre. Déjà qu’à Québec, l’an dernier, l’événement avait donné lieu à un déploiement policier sans précédent : barrages routiers, périmètres de sécurité et fouille des participants. Imaginez cette année! On dira ce qu’on voudra, la Saint-Jean n’est plus la fête de tous les Québécois. Une majorité de citoyens resteront chez eux pour ne pas mettre en péril leur propre sécurité ou celle de leur famille. De nombreux élus les imiteront pour éviter de mettre le feu aux poudres. Bref, le Québec est manifestement une société distincte: on y subventionne même le saccage du bien public.

mercredi 20 juin 2012

Financement des partis: comment contrer «l'argent sale»?

La Presse.ca, La Presse Débats, mercredi le 20 jun 2012.


Jacques Duchesneau a affirmé devant la commission Charbonneau que 70% des sommes récoltées par les partis provinciaux pour les élections sont de «l’argent sale». «On serait devant une culture éhontée et généralisée de pots-de-vin et de corruption», soutient l’ex-directeur de l’Unité anticollusion. Croyez-vous que le financement illégal a pris une telle ampleur au Québec ? Que devrait-on faire pour remédier à cette situation ?
Libéralisons le financement électoral 
En 1977, le Québec adoptait une loi régissant le financement électoral. On la disait une des plus rigoureuses au monde. Trente-cinq ans plus tard, Jacques Duchesneau  prétend que 70% des sommes récoltées par les partis provinciaux sont de «l’argent sale». Surpris? Pas vraiment! Tout simplement parce que trop souvent ce sont les lois et les impôts abusifs qui font naître les activités illicites. Dans les années 1920, les gouvernements canadiens et américains ont légiféré pour tenter d'éliminer l’alcool de nos vies. Il s'en est suivi ce que plusieurs qualifient d'âge d'or de la corruption et du marché noir. À vouloir restreindre par la force les sources de financement des partis politiques, on ouvre la porte aux organisations illicites et occultes. On attire sur le marché politique des petites mafias qui, grâce à un puissant réseau d'influence, servent la caisse de nos partis. Encore aujourd’hui, le débat sur le financement de nos partis politiques se tient les plans moral et répressif. C'est peut-être là le hic! On néglige l'idée qu'il suffirait de relaxer les contraintes imposées par notre loi électorale pour contrer la corruption.

(Ce billet est le résumé d’un texte paru dans le Journal de Québec et sur Cyberpresse en avril 2010.)

mardi 19 juin 2012

Le pont Maurice-Richard: une bonne idée?


La Presse.ca, La Presse Débats, mardi le 19 juin 2012.
Le ministre Denis Lebel évoque la possibilité que le futur pont Champlain porte le nom de Maurice-Richard. Croyez-vous que ce serait une bonne idée ?
Le Harpont!
Par définition, s’il est un ouvrage collectif capable de rapprocher les citoyens de toute allégeance, c’est bien un pont. Surtout si on lui donne le nom d’une référence historique comme Champlain ou d’une légende sportive comme Maurice Richard. Un nom permettant de contenter à la fois les nationalistes, les fédéralistes, la gauche et la droite sans distinction. Mais voilà, il faudra encore attendre 10 ans avant de franchir ce pont. On prévoit que les travaux devraient débuter en 2016 et se terminer en 2022. Personnellement, j’estime qu’on a amplement le temps de consulter les citoyens pour arrêter un nom définitif. D’autant plus que nous n’en sommes qu’à l’étape de la planification et qu’il y a des choses beaucoup plus urgentes à régler, ne serait-ce que de décider de l’architecture et de l’emplacement exact de ce pont. Pour l’instant, notre seule certitude, c’est qu’il nécessitera des investissements publics de l’ordre 5 milliards $. Des fonds publics qui, nous l’espérons, seront investis judicieusement. En attendant, nous pouvons lui donner un nom temporaire. Un nom qui nous rappellera qu’il s’agit d’un pont de propriété entièrement fédérale : le Harpont! Accrocheur, non?

jeudi 7 juin 2012

Une justice équitable?


La Presse.ca, La Presse Débats, mercredi 6 juin 2012.
Trois ans après avoir tué ses deux enfants, et un an après avoir été reconnu criminellement non responsable de leur mort, Guy Turcotte pourra recouvrer partiellement et graduellement sa liberté au cours des six prochains mois. Les Québécois sont-ils en droit de douter de leur système de justice à la suite de la décision de la Commission d’examen des troubles mentaux ?
Coupable d’irresponsabilité
Guy Turcotte a reconnu avoir tué ses deux enfants. Le tribunal a cependant jugé qu’il n’était pas responsable du meurtre en question. Même si le tueur est connu de tous, il ne sera pas puni parce qu’on a jugé qu’au moment de l’événement, il n’était pas responsable de ses actes. À partir de ce moment, le sort de l’irresponsable a été confié à la Commission d’examen des troubles mentaux, une commission dont le rôle est essentiellement d’évaluer le danger que représente Turcotte pour la société. Or, la Commission vient de décréter qu’il pouvait recouvrer, en partie, sa liberté. Comme beaucoup de Québécois, tout ça me laisse songeur. Deux enfants sont morts, mais personne n’est responsable. Le crime a bien eu lieu, mais ce n’est la faute de personne. Aujourd’hui, beaucoup de Québécois ont le sentiment que notre système de justice, basée sur la responsabilité, s’est départi de sa responsabilité de rendre justice pour la confier à l’appréciation de psychiatres. Des experts qui se contredisent sur la dangerosité d’un tueur irresponsable redevenu suffisamment responsable pour réintégrer la société. Pour les citoyens responsables, Guy Turcotte sera toujours coupable… à tout le moins coupable d'irresponsabilité.