mardi 9 octobre 2012

Les dangers d’une gouvernance verte


Journal de Québec et Journal de Montréal, mardi le 9 octobre 2012.

Pierre Simard et Germain Belzile*

Le Québec deviendra un chef de file environnemental dans le monde, selon Mme Marois. « Les verts sont au pouvoir », ajoute notre nouveau ministre de l’Environnement. Cette nouvelle gouvernance verte ramènera-t-elle la province sur le chemin de la prospérité? Permettez-nous d’en douter.
Le gouvernement ne crée pas d’emploi
Il suffirait, semble-t-il, d’un peu de volonté gouvernementale pour inonder le marché d’emplois verts. La réalité, c’est que le gouvernement ne crée pas d’emploi. S’il choisit d’investir dans un secteur économique, ce sera au détriment d’un autre. En d’autres mots, tout ce qu’un gouvernement péquiste pourra faire, c’est de subventionner son économie verte par des impôts prélevés dans l’économie productive.

Le gouvernement ôtera donc des ressources à des entreprises qui contribuent à notre qualité de vie, pour les réorienter vers des entreprises vertes dont les activités seront triées par les politiciens. Par exemple, il détruira des emplois dans le secteur de l'énergie conventionnelle en nous promettant, en contrepartie, de créer des emplois dans les énergies vertes.
Le problème avec les emplois verts promis par le gouvernement Marois, c’est qu’on détruira des emplois visant à satisfaire les préférences des consommateurs, pour les remplacer par des emplois correspondant aux préférences des politiciens. Et c’est sans compter que l’implication du gouvernement dans l’économie ne se fait jamais à coût nul. N’oubliez pas qu’à l’occasion de ce transfert de richesse vers l’économie verte, le gouvernement prélèvera un petit pactole pour subvenir à ses propres opérations, achètera au passage l’adhésion des groupes de pression et paiera une prime pour couvrir les risques financiers d’un entrepreneur politique qui n’entreprend jamais rien sans que l’État ne couvre ses arrières.
Les politiciens attirent les prédateurs de fonds publics
En confiant à des politiciens le rôle de sélectionner les entreprises de l’avenir, on étouffe l’entrepreneur capitaliste au profit de l’entrepreneur politique. On privilégie cet entrepreneur qui gagne sa place au soleil en décrochant un mirobolant contrat gouvernemental, en faisant subventionner son entreprise ou en faisant adopter une loi ou un règlement qui nuit à la concurrence. La commission Charbonneau nous rappelle d’ailleurs, chaque jour, les dangers de l’intervention massive de l’État dans l’économie.

Ce n’est pas parce qu’un élu a le pouvoir d’investir l’argent des contribuables qu’il est apte à faire les bons choix pour l’avenir du Québec. L’exemple des pays européens qui ont dû abandonner d’ambitieux programmes publics verts  -  en raison des coûts astronomiques et de leurs effets néfastes sur les finances publiques - devrait nous inviter à la prudence.
Le gouvernement a peut-être un rôle légitime à jouer dans le financement de la recherche en environnement, mais les politiciens devraient faire acte d’humilité et laisser les entrepreneurs capitalistes s’occuper des préférences environnementales des citoyens. N’ayez crainte, il y aura toujours un entrepreneur capitaliste pour satisfaire une préférence verte chez le consommateur.
D’ici là, on peut présumer que l’opération « économie verte » mise de l’avant par le nouveau gouvernement réduira notre qualité de vie, nous fera perdre des emplois productifs et renforcera la présence d’un type d’entrepreneur dont nous cherchons à nous débarrasser : le prédateur de fonds publics.
* Les auteurs sont respectivement professeur à l’ENAP et maître d’enseignement à HEC Montréal.