Alors que le Québec n’en finit plus de débattre
de gratuité, de gel ou d’indexation de ses droits de scolarité, les grandes universités du monde regardent vers l’avenir.
Dans la récente édition du magazine « The
American Interest », Nathan Harden prédit la fin des universités
américaines telles qu’on les a connues : l'Éducation supérieure sera
dorénavant de plus en plus accessible, de moins en moins coûteuse et plusieurs
universités devront se résigner à fermer leur porte. Il va même jusqu’à prédire
que d’ici dix ans, l’Université Harvard aura 10 millions d‘étudiants. De la
fiction? Pas du tout!
Tout le monde le sait, les industries basées
sur l’acquisition et la diffusion d’information vivent une évolution remarquable.
Vous pouvez désormais planifier un voyage sur Google Maps, trouver des réponses
à vos interrogations sur Wikipédia - la plus grande encyclopédie au monde - où utiliser
Skype pour joindre un ami à l’autre bout de la planète. Il suffit d’être
branché à internet.
Le monde universitaire n’échappe pas à cette
révolution. Depuis quelques années, plusieurs grandes universités américaines
se sont lancées dans la course aux MOOC (Massive open online course); des cours
en ligne « massivement » ouverts.
Il s’agit de formations sous forme
d’enregistrements vidéos où un grand nombre d’étudiants participent à des
forums, des laboratoires, des groupes d’études, et échangent avec d’autres
étudiants comme s’ils fréquentaient un cours dans une université traditionnelle.
Ces formations se comptent déjà par centaines
et devraient se raffiner et se multiplier dans les prochaines années.
Parmi les universités engagées dans la compétition :
l’Université Harvard et le Massachusetts Institute of Technology (MIT). À l’automne 2012,
ils unissaient leurs efforts pour lancer le site edX (edX.org). Ce site offre
des formations en ligne identiques à ceux que reçoivent les étudiants qui
fréquentent leurs salles de cours, avec, à la clé, un certificat pour ceux qui
réussiront les examens. Le tout gratuitement… pour l’instant du moins.
Mieux encore, pendant que le gouvernement du
Québec annonçait des coupes budgétaires et qu’il invitait nos universités à se
serrer la ceinture, ces deux universités privées investissaient plus de 60
millions de dollars dans un organisme indépendant chargé d’observer les
apprentissages et de raffiner les technologies.
Aujourd’hui, la concurrence est vive entre les
grandes universités pour étendre leurs enseignements aux étudiants du monde
entier. Le jour n’est pas loin où quiconque avec un peu de volonté et de talent
pourra s’inscrire en ligne dans une université prestigieuse pour une fraction
du coût en campus.
Imaginez l’étudiant de la Gaspésie qui suivra
le programme universitaire de son choix, dans l’université de ses rêves, à un
coût abordable et sans avoir à déménager à la ville.
Il est donc un peu singulier de voir le monde
universitaire québécois ignorer la révolution en cours et se quereller sur des
enjeux d’une autre époque. Comme si le Québec était imperméable au reste du
monde!
Comment survivre à cette révolution? Voilà la question
qui devrait inquiéter les acteurs de notre sommet sur l’enseignement supérieur.
La spécialisation et le caractère francophone de nos universités seraient
sûrement des atouts à exploiter, mais il semble que chez nous, les universités
doivent d’abord faire de la politique.
La bonne nouvelle, c’est que toutes nos
hésitations ne devraient pas nuire à l’accessibilité des jeunes Québécois à des
formations universitaires de qualité : les grandes universités du monde
s’en occupent. Seule la survie de nos universités est en jeu, mais ça, on ne le
voit pas. La poutre dans l’œil!