samedi 9 décembre 2017

Dire « NON » à la Davie

Le Devoir, Idées, lundi 11 décembre 2017

Le maire de Lévis se demandait s’il n’y a pas, au gouvernement fédéral, « une volonté de fermer la bonbonne d’oxygène » de la Davie. Et pourquoi pas? Pour une fois que des considérations de saine gestion publique semblent prévaloir sur les motivations électoralistes de nos politiciens…
                         
Peu importe qu’il ait besoin d’un nouveau navire ou non, le gouvernement fédéral a le droit, et surtout le devoir, de dire « non » à la Davie s’il juge que cette dernière est incapable de lui offrir des navires de qualité, à prix compétitif et dans un délai raisonnable.

L’importance de pouvoir dire non
On peut comprendre qu’il soit difficile pour le gouvernement fédéral de dire « non » à une entreprise qu’il nourrit depuis des décennies. Toutefois, comme nous le rappelait l’économiste Don Boudreaux*, le droit et la capacité de dire « non » sont primordiaux au fonctionnement du marché.

C’est la peur de se faire rejeter par les consommateurs qui poussent les entreprises à offrir les biens et services au meilleur prix possible; c’est ce pouvoir de dire « non » qui a permis aux consommateurs d’obtenir des entreprises qu’elles améliorent leurs produits.

Il n’y a dans les faits que les entreprises qui vivent aux crochets de l’État qui peuvent ignorer cette réalité. Pourquoi les fournisseurs de l’État ne sont-ils pas contraints aux mêmes obligations que les entreprises en concurrence? Le travailleur qui trime avec ardeur pour payer les impôts qui permettent les dépenses publiques ne mérite-t-il pas que le gouvernement fasse usage de son argent avec le même discernement que lui?

Il nous apparaît donc normal et justifié que le gouvernement Trudeau puisse dire « non » aux entreprises qui, comme la Davie, sont incapables de démontrer qu’elles sont suffisamment efficaces et productives pour vivre sans toucher le pactole de l’État.

Un bilan peu reluisant
Soyons honnêtes, le chantier de la Rive-Sud de Québec n’a rien d’une entreprise modèle. À moins de fixer la barre du fleuron régional au ras du sol, on doit reconnaître que la Davie s’est surtout démarquée par ses changements de propriétaire, ses retards de livraisons, ses dépassements de coûts et des relations de travail difficiles.

Il faut avoir une mémoire très sélective pour faire fi du passé et réclamer du gouvernement fédéral un énième contrat pour la Davie.

Le premier ministre Couillard devrait d’ailleurs s’excuser auprès des contribuables québécois pour avoir mené la récente marche de soutien à la Davie alors qu’un important contentieux oppose son gouvernement au chantier naval.

Est-il nécessaire de lui rappeler que les traversiers commandés au chantier de Lévis pour relier Tadoussac à Baie-Sainte-Catherine coûteront plus du double que prévu et seront livrés avec un minimum de trois ans de retard?

Un nouveau chèque d'aide sociale
Ce que réclame la Davie, c’est un nouveau chèque d’aide sociale déguisé en contrat. Plutôt que d’investir dans la compétitivité et la qualité de ses travaux, elle joue encore la carte du chantage politique en brandissant les menaces de fermeture et de mise à pied des travailleurs. 

La bonne nouvelle, c’est que quelqu’un à Ottawa semble avoir finalement compris que l’argent du gouvernement ne tombe pas du ciel, qu’il est prélevé des poches du contribuable et que chaque nouvel emploi improductif sauvé à la Davie éliminerait un emploi productif ailleurs dans l’économie. Bref, qu’octroyer un nouveau contrat à la Davie ne ferait qu’appauvrir les Canadiens comme les Québécois.
...
On ne peut que saluer cette résistance gouvernementale aux abuseurs de fonds publics. Il ne reste maintenant qu’à faire comprendre à la Davie et à ses meneurs de claque que, quand c’est non, c’est non!
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*Don Boudreaux, Thoughts On theRight NOT to Contract, Café Hayek, 5 décembre 2017.