Journal de Québec et Journal de Montréal, septembre 2014 (JQ p.18 et JM p.36 )
Le premier ministre Couillard nous rappelle constamment
que sa priorité est la création d’emploi. Désolé, mais les emplois ne devraient
pas être une priorité. Soyons sérieux, qui a besoin d’un travail?
Comme l’explique l’économiste Pierre Lemieux
dans « Who Need Jobs?», qui vient tout juste de paraître chez Palgrave, les
gens recherchent non pas un travail, mais les revenus qui y sont associés. On vous
garantirait le même salaire pour vaquer à votre loisir préféré que vous n’hésiteriez
pas à donner votre démission sur-le-champ.
Pourquoi revenir sur cette évidence? Parce que
nos politiciens semblent ignorer que ce sont nos revenus, et non notre emploi,
qui nous permettent d’améliorer notre qualité de vie. Aussi, l’objectif du
gouvernement Couillard ne devrait pas être de créer des emplois, mais de favoriser
la création de richesse. Or, les moyens d’atteindre les deux objectifs sont
bien différents.
Par exemple, investir dans les éoliennes pour produire
de l’électricité dont on n’a pas besoin, pour ensuite la brader à un prix inférieur
à son coût, ne crée pas de richesse. Au contraire, ce genre de politique détruit
une partie des revenus des contribuables.
Il est vrai qu’un tel projet permet à quelques
travailleurs chanceux de récupérer, par la magie de l’impôt, le revenu d’un
travailleur productif. Mais pour faire quoi? Pour produire une électricité
inutile alors que le contribuable qui a financé ce projet avec ses impôts
aurait pu utiliser l’argent que lui a prélevé le fisc pour améliorer sa qualité
de vie.
Imaginez que l’on vous remette une partie des
impôts qui ont été prélevés sur votre salaire. Vous dépenseriez avec plaisir ces
revenus récupérés et vous stimuleriez ainsi la création de nouveaux emplois productifs.
En fait, les politiques de création d’emplois
consistent à déshabiller Paul pour habiller Pierre. Et, au cours du processus,
on détruit une partie des revenus des contribuables.
L’argent du gouvernement ne tombe pas du ciel.
Elle est prélevée des poches du contribuable. Aussi, chaque nouvel emploi
soi-disant créé par le gouvernement correspond à un emploi productif perdu
ailleurs dans l’économie. Pire encore, cet emploi productif sera la plupart du
temps remplacé par un emploi improductif.
Quand un gouvernement fait de l’emploi sa
priorité et s’imagine pouvoir créer des emplois en lieu et place des
consommateurs, on ne peut que s’inquiéter. L’expérience nous a appris qu’il jouera
au Robin des bois en subventionnant des entreprises désuètes pour sauver des
emplois improductifs; qu’il freinera l’apparition de projets novateurs et
créateurs de richesses au nom de l’emploi en région; qu’il multipliera les
réglementations pour protéger des travailleurs incapables de suivre la
concurrence.
Au moment où une commission est chargée d’explorer
les moyens de nous prélever plus d’impôt pour permettre au gouvernement de remplir
sa promesse de créer 250 000 emplois, nous devons nous rappeler que l’URSS
ne s’est pas effondrée parce qu’elle manquait d’emplois. Au contraire, tous les
Soviétiques avaient un emploi… créé par l’État. On a seulement oublié de créer de
la richesse!
Lemieux, Pierre, Who Need Jobs?: Spready Poverty or Increasing Welfare, Palgrave Macmillan, New York, 2014, 201
p. (disponible sur Amazon.ca)